Et pourquoi pas une Chanvrière ?
La crise du coronavirus n’étant pas terminé, il est difficile de savoir jusqu’où vont aller les conséquences des confinements à travers le monde. Quoi qu’il en soit, se pose la question des capacités de résilience d’un système mondialisé comme (l’était jusqu’avant la crise) le notre.
Les ruptures d’approvisionnements dans les secteurs de l’industrie ont été mis en lumière rapidement après que des acteurs tels que la Chine soient entrés en confinement.
La disponibilité des matières premières est stratégique et ne pas la maîtriser rend des hommes, des femmes et des enfants entièrement dépendants des acteurs dominants.
Aujourd’hui, les masques sont au coeur de toutes les préoccupations, mais il n’est pas difficile à imaginer que d’autres ressources puissent devenir rare, au fur et à mesure de la reprise des activités économiques à l’international.
Je ne vous propose pas de réinventer la roue mais simplement de planter du chanvre.
Avant l’avènement du pétrole et de tous ses dérivés, le chanvre était la matière première la plus utilisée au monde. Une matière première 100% renouvelable, qui pousse quasiment sans eau, sans produits chimiques, qui structurent et fertilisent les sols, qui pousse en seulement 4 mois et préserve la biodiversité.
Le chanvre était utilisé dans tous les secteurs (textile, cordage, papeterie, médecine, construction, alimentation, énergie, litière animale) mais l’industrialisation du coton, l’avènement du pétrole, l’utilisation de la pulpe de bois pour le papier, la découverte de l’aspirine, la propagande de quelques puissants pour servir leur intérêts personnels, a précipité la disparition des champs de chanvre à partir des années 1930. (Voir l’histoire du chanvre notamment raconté par Jack Herer dans L’Empereur est nu paru en 1985 et je vous recommande ce numéro vidéo de PLANÈTE qui traite le sujet: https://www.youtube.com/watch?v=QECfF_c19FI )
La France n’a jamais cessé de produire du chanvre, mais les quelques 17 000 hectares de 2018 sur le territoire national sont encore bien loin des 175 000 hectares que notre pays comptait dans les années 1850. Nous n’avons pas tout perdu du savoir faire, mais nous partons tout de même de loin.
Le chanvre est une plante résiliante, elle sait s’adapter à tous les environnement, on la cultive sous toutes les latitudes.
Les qualités techniques des produits issus du chanvre sont intéressants, naturellement anti bactérien, anti UV et onde, résistant, absorbant, isolant performant, compostable… il possède des arguments pour toutes les utilisations et ce matériau bio sourcé constitue une alternative intéressante aux produits fossiles jusqu’ici majoritairement utilisés. (nous pourrons en reparler)
Pour l’anecdote, avez-vous vu passer ces masques catégorie 2, 100% français, fait à base de fibre de chanvre ? (https://www.geochanvre.fr/masque/)
Pour en venir au fait, l’idée est de re-développer la filière du chanvre sur le territoire de la biovallée et dans un rayon de 150 km en installant une unité de défibrage de la paille de chanvre chargée de séparer la fibre de la chènevotte (la partie boisée interne du chanvre) pour fournir en matériaux bio sourcés le secteur de la construction et ainsi soutenir la transition écologique dans ce secteur si consommateur d’énergie grise et de matériaux fossiles (un rapide aperçu des impacts de la consommation du sable par exemple ici:https://www.youtube.com/watch?v=XwJGWea4fyM&t=205s)
Cette unité de défibrage est necessaire puisqu’elle permet de valoriser la paille de chanvre cultivée et récoltée par les agriculteurs. Elle est un maillon essentiel de la chaîne de valeur.
Une fois défibré nous aurions fibre, chènevotte et poussière pouvant fournir une multiplicité de secteur. (comme énoncé plus haut)
Le chanvre peut-être utilisé par exemple dans le secteur de la construction & rénovation, sur les toits (en ballots de paille), pour les murs (panneaux isolants ou béton chaux/chanvre) et pour les dalles également. On dit souvent qu’un hectare de chanvre fournit assez de matériaux pour construire une maison de 80 m2. On remplace ainsi les tonnes de sables par des tonnes de chanvre.
La cerise sur le gâteau est que le chanvre absorbe en 4 mois de culture l’équivalent de 15 tonnes de Co2 atmosphérique par hectare, et ce, grâce au processus de photosynthèse. La plante transforme directement en carbone le Co2 dans sa tige, ses racines, ses feuilles et ses sommités. 15 tonnes représente environ l’empreinte carbone annuelle cumulée de 7 français que nous ne devons pas dépasser pour respecter les accords & objectifs de Paris.
C’est donc également un véritable aspirateur à Co2.
Pour conclure mon propos, alors que je nous ai pas encore parlé de la richesse de graine de chanvre pour l’alimentation ou la cosmétique, nous avons devant nous l’opportunité d’utiliser le chanvre dans pratiquement tous les secteurs qui existent et ainsi entrevoir l’espoir d’inventer des nouvelles chaines de valeur locales, durables, autonomes, en circuit court et résiliantes.
À nous d’inventer ce modèle, qui, je le souhaite, se doit d’être reproductible dans d’autres bassins de vie en France.
En avant pour l’intelligence collective et connective!
Je suis actuellement en train de travailler sur ce projet d’unité de défibrage dans la Biovallée et suis notamment en lien avec plusieurs acteurs dont Drôme Chanvre. Je suis également incubé au sein de Ronalpia, incubateur partenaire de l'association.
Hâte de vous lire :) Merci d'avance pour votre participation à la refléxion !
PS: Nous parlons ici bien du chanvre industriel dont la culture est réglementée au niveau Européen grâce à un catalogue de variétés autorisées avec un taux de THC inférieur à 0,2% (un cannabinoïde psycho-actif connu du chanvre), en France seul la paille de chanvre et la graine de chanvre peuvent être valorisées, pas la fleur.